Dans cet article :
- Jour 4 (4 juillet 2022) : randonnées dans les roches
- Jour 5 (5 juillet 2022) : Nous voilà, océan Arctique !

Jour 4 (4 juillet 2022) : randonnées dans les roches
Je ne sais pas si c’est la fatigue de la rando de la veille, le coup de chaud que j’ai attrapé, le doliprane que j’ai pris avant de me coucher, ou une température enfin raisonnable (en dessous de 20°C), mais ma nuit a été réparatrice. J’ouvre les yeux à 8 h 30, une première depuis mon départ. Ouna était bien sage mais dès qu’elle m’entend bouger, elle commence à s’impatienter.
Ce matin donc, nous prenons notre temps et quittons le camping un peu avant 10 h pour continuer notre périple sur la Dempster Highway. J’avais repéré quelques randonnées que nous pourrions faire sur la route (à l’aller ou au retour), il suffit juste de choisir par laquelle commencer. Ce sera Windy Pass Peak, au kilomètre 151 car elle est affichée facile et est relativement courte.
Après une petite heure de route, nous arrivons au départ. Je chausse mes chaussures de rando, attrape mon sac, mets la laisse à Ouna et c’est parti. Nous devons passer quelques arbres avant de rejoindre la toundra bosselée mais il y en a tellement peu que ce n’est pas vraiment du bush walking. Je libère Ouna et nous évoluons rapidement jusqu’à la base de la montagne.
La première ascension est assez raide, mon corps n’est pas encore prêt pour un tel effort, si bien que je transpire déjà à grosses gouttes. Il fait plus de 25°C !
Une fois sur la crête par contre, la marche se simplifie, tantôt sur des parties herbeuses, tantôt sur des parties rocailleuses. Le ciel est toujours voilé à cause des feux de forêt, ce qui limite la sensation d’horizon à l’infini, mais les vues sont néanmoins jolies. L’atteinte du pic se mérite, le terrain devient plus pentu, mais surtout très rocailleux. Je ralentis le rythme, doucement mais sûrement, alors qu’Ouna est déjà loin devant. Une heure trente après avoir quitté la voiture, nous voilà au sommet, et si je n’avais pas autant de route à faire, je partirais bien explorer les différentes crêtes alentours.

Repues par une pause collation pendant laquelle nous avons contemplé les paysages qui nous entouraient, nous nous décidons à amorcer la descente.
Nous continuons sur la Dempster Highway, jusqu’à présent en bonne condition, jusqu’au ruisseau Engineer près duquel j’avais repéré une autre petite rando. Une fois garée, j’hésite cependant. Mon corps est fatigué par ce début de voyage, il fait 28°C, et bien que courte (légèrement plus de deux kilomètres), le dénivelé annonce une montée raide. Finalement, je me décide et let’s go hiking !
En effet, la côte est pentue, mais j’aime le décor dans lequel nous évoluons : une forêt de pins avec des fleurs de cotons, puis des fougères. Au loin, on devine les formations rocheuses auxquelles le sentier va nous mener.


J’avoue, j’ai chaud, voire très chaud (mais cette fois, j’ai de l’eau en masse) et je galère un peu à garder mon rythme. Je fais donc une pause, et je tombe nez-à-nez avec des orchidées sauvages, trois espèces différentes, là juste à mes pieds. Je suis aux anges ! Après moultes photos, je reprends donc la randonnée et j’avance de nouveau d’un bon pas.



Bien plus vite que je ne le pensais, j’arrive face aux premières formations rocheuses. Ouna, toujours devant, m’attend d’ailleurs entre deux parois, qui me font penser aux Pierres des Rois qui bordent le fleuve Anduin dans le Seigneur des anneaux. Derrière elles, des vues à couper le souffle.

Je continue encore plus haut, je veux en voir plus et je ne suis pas déçue. C’est tellement beau et tellement peu ordinaire, que je reste sans voix, comme hypnotisée par ces géants de pierre qui se dressent de part et d’autre de nous. Parfois, ce ne sont pas les randonnées les plus exigeantes qui apportent les meilleures récompenses !




Au loin, le tonnerre gronde me rappelant à la réalité. Je quitte à contrecœur ce lieu magique me promettant d’y retourner un jour et regagne la voiture. Il est 16 h 30 et je prévois conduire jusqu’à la frontière avec les Territoires du Nord-Ouest, peu de kilomètres (266) mais sur la Dempster où le compteur kilométrique ne dépasse que rarement les 90 km/h, cela prend du temps…
Nous atteignons Eagle Plains, 8 habitant·e·s à l’année, un garage/station-service/motel, où nous prenons de l’essence avant de continuer. Plus qu’une quarantaine de kilomètres et nous atteindrons le cercle polaire arctique. Pendant ces quelques kilomètres, je me fais la réflexion que ce sera la 3e fois que je passerai cette ligne imaginaire. En 2012, sur l’Île de Grímsey (Islande), avec Laurent ; en 2017, ici même, sur la Dempster avec Mathieu ; et maintenant, en 2022, avec Ouna. Je ne peux m’empêcher de penser que j’aurai de nouveau rendez-vous avec l’Arctique en 2027…
Bref, nous atteignons le célèbre lieu du cercle arctique et, c’est peut-être bête, mais je suis émue, pas tant pour moi, mais pour Ouna. Je la regarde et je lui dit : « You’re back home, pup’ ». Car oui, Ouna est une chienne arctique, née à Old Crow, une petite communauté autochtone accessible uniquement en avion, au nord-ouest du Yukon. Je l’ai adoptée à Dawson, et elle n’était pas retournée en Arctique depuis.

Il est 19 h passées, il se met à pleuvoir, mais nous continuons. J’aimerais parcourir encore une cinquantaine de kilomètres jusqu’au camping territorial Rock Creek. Alors que je ralentis à cause de nids de poule et que je me dis que je n’ai pas encore vu d’animaux pendant mon périple (un porc-épic sur la route du mont Hinton, ça compte ?), une maman original et son bébé traversent la Dempster devant moi. J’aime la vie !
Une fois à Rock Creek, je décide finalement de continuer car, à peine sortie de la voiture, je suis entourée d’un nuage de moustiques et une bonne cinquantaine est déjà entrée dans la voiture. Nope nope nope ! Je remonte fissa dans Rocky, ouvre grand les fenêtres et roule pour qu’ils partent le plus vite possible. À la recherche d’un spot pour la nuit… Je le trouve quelques kilomètres plus loin, dans un espace dégagé en plein vent, parfait ! Direct au lit après une journée bien remplie.
Alors que je lis, j’entends un orage au loin et m’aperçois qu’il se rapproche. Soudain, un coup de tonnerre explose et fait trembler la voiture, je prends peur… mais l’orage s’éloigne aussi vite qu’il est arrivé. Enfin, je peux dormir.
Jour 5 (5 juillet 2022) : Nous voilà, océan Arctique !
Réveillées à 7 h, Ouna et moi quittons la chaleur de la voiture pour notre pause pipi matinale et notre petit déjeuner. Il n’y a plus de vent ce matin et notre spot n’est finalement pas si parfait que cela… À peine sorties de la voiture que nous nous faisons attaquer par des hordes de moustiques. Nous faisons nos besoins mais remontons tout de suite dans la voiture pour se mettre à l’abri… Le petit déjeuner attendra !
Au programme de la journée, conduire jusqu’à l’océan Arctique ! Mais en démarrant la voiture, une lumière orange de maintenance reste allumée sur mon tableau de bord. J’espère que ce n’est rien de trop grave… Ça va devoir attendre Fort McPherson, à une centaine de kilomètres d’ici.
Une vingtaine de minutes après notre départ, nous atteignons la frontière Yukon-Territoires du Nord-Ouest (TNO), le seul territoire où je ne suis pas encore allée. Je réalise que j’ai oublié mes chaussures de marche à l’endroit où nous avons dormi… la blonde ! En cause ? Le départ précipité de ce matin. J’hésite à aller les récupérer. Je décide de continuer la route, elles devraient toujours être là quand je repasserai dans quelques jours.

La frontière se trouvant sur un col, il y a du vent et pas de moustiques, nous profitons donc de la pause photo pour prendre notre petit déjeuner.
J’arrive alors au premier traversier, celui qui permet de franchir la rivière Peel. Moment de solitude, le panneau indique que le premier trajet est à 9 h 30 et il est 8 h 48… Foutus moustiques qui nous ont speedées pour rien. Je m’apprête limite à faire une petite sieste quand je vois le traversier bouger depuis l’autre rive. Et là, dans un éclair de lucidité, je réalise que nous sommes aux TNO et qu’il est donc une heure plus tard ici, soit 9 h 48. Pas de sieste donc, on poursuit notre chemin sur la Dempster et arrivons rapidement à Fort McPherson où je cherche désespérément un garage.

Je finis par en trouver un, mais qui d’habitude répare les pneus, et n’a donc pas l’appareil pour lire le code d’erreur lié à mon signal lumineux. Le garagiste, très accueillant et serviable, vérifie mon niveau d’huile, en ajoute un peu et débranche ma batterie. Il doit voir à ma tête que je me demande pourquoi il fait ça car il m’explique que cela devrait agir comme un reset. OK… il rebranche le tout, je démarre, plus de lumière orange. Mon sauveur ! Et en plus, il m’offre son temps, me revoilà donc repartie avec comme prochaine étape Inuvik.
Le deuxième traversier s’annonce, celui-ci pour franchir le fleuve Mackenzie, et la descente vers la zone d’attente est magnifique. On surplombe le village autochtone de Tsiigehtchic, ou le Hollywood du Nord (on surnomme bien Dawson, le Paris du Nord, alors pourquoi pas). Je ne m’arrête pas dans ce village mais continue vers Inuvik.



Depuis que nous sommes parties à 7 h 05 ce matin, nous ne nous sommes pas encore dégourdi les jambes. Nous nous arrêtons à Tithegeh Chii Vitaii Territorial Viewpoint, à quarante kilomètres d’Inuvik. Le sentier de 3,5 kilomètres est sympathique, avec de jolies vues sur le lac Campbell. Nous marchons cependant assez vite pour tenter d’échapper aux nuages de moustiques, nous terminons même la boucle en courant… Ah, l’été au Nord…



Il est 14 h 30 quand nous arrivons à Inuvik, non sans apprécier les onze kilomètres de vraie route goudronnée ! L’espace de quelques minutes, le cahin-caha qui nous accompagnait depuis deux jours se tait. C’est agréable !
L’océan Arctique n’est plus qu’à 149 kilomètres. Ce soir, nous dormirons face à lui.
Avant de reprendre la route, nous faisons un rapide arrêt au Centre d’accueil régional de l’Arctique de l’Ouest, organisé sous forme de mini musée. L’hôtesse d’accueil nous remet un coupon de réduction de 5 % sur notre prochain plein d’essence (sympa) et une liste des choses à faire à Inuvik, la plus grande ville de l’Arctique avec une population de plus de 3 200 âmes.

Et c’est reparti ! Je trouve la route moins bonne, elle semble « molle » avec tous ces graviers si bien que je roule entre 50 et 60 km/h… lentement donc. Les paysages changent complètement. Les conifères laissent place à de la végétation arbustière et à de nombreux lacs. Çà et là, des motoneiges abandonnées jusqu’à l’hiver prochain. Je me demande comment leurs propriétaires les retrouveront après les premières chutes de neige…

Nous finissons par arriver à Tuktoyaktuk, Tuk pour les intimes, un hameau Inuvialuit de près de 900 habitant·e·s. Situé sur la baie de Kugmallit, à proximité du delta du fleuve Mackenzie, c’est le bout de la route. Face à nous, l’océan Arctique ! We made it !!

Je trouve une place pour la nuit. Ce n’est pas le coin le plus sexy, car tous les véhicules sont presque les uns sur les autres, mais c’est quand même correct, et surtout, c’est face à l’océan.

Mes amis Jennifer et Guillaume y étaient allés en 2018 et avait été déçus à leur arrivée puisque de nombreux véhicules étaient stationnés littéralement au bout de la route. Il faut dire que la route reliant Inuvik à Tuktoyaktuk a été construite en 2017. 2018 a été la première saison touristique du village autochtone. Depuis, des règles ont été imposées concernant les lieux où il est autorisé de stationner et ceux où il est possible de se baigner.
Une fois garée donc, je pars explorer le village si typique du vrai Nord, avec tous les édifices sur pilotis à cause du pergélisol. Ouna et moi nous baladons pendant plus d’une heure avant de retourner à la voiture. J’hésite à me baigner… je ne suis pas découragée par la température de l’eau mais davantage pas les vaguelettes qui viennent se briser sur de gros rochers. Je décide de passer mon tour, mais me pose face à l’océan, avec mon livre et un cidre.






Je me fais la réflexion qu’il n’y a pas de marée ici, pense que c’est à cause de la proximité avec le pôle Nord, sans vraiment savoir si c’est bien la raison. Il faudra que j’effectue des recherches, une fois revenue à la civilisation.
Ce soir, bercées par le son des vagues, nous nous endormons paisiblement.
https://www.cieau.com/connaitre-leau/leau-dans-la-nature/tout-savoir-sur-les-marees/
Tiens, ça explique les marées 🙂
A priori, il y en a aussi dans l’Arctique, mais à certains endroits assez faibles en comparaison avec ce que t’as pu voir sur la côte atlantique en France. J’ai vu passer un truc sur un site comme quoi dans l’Arctique côté Canada c’était juste 0.5m de marnage (amplitude entre mer basse/haute) alors que côté Europe, ça pouvait aller jusqu’à 10m!
PS: me souviens bien du panneau 😉
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Oh merci pour les recherches, car j’avoue que je n’avais toujours pas eu le temps de les faire ! J’ai aussi appris un mot 😉
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Comme d’habitude, très agréable à lire et à voir, tellement c’est bien écrit et documenté.
Appartement une belle virée jusqu’à l’océan Arctique.
À bientôt et bisous
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Merci Willy ! C’était en effet une très belle virée 🙂
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