Sur la route, seule, jusqu’à Toronto

Dans cet article :

© Kelly Tabuteau

Jour 65 (25 septembre) : Court arrêt au Parc national Pukaskwa

J’essaye de me forcer à reprendre une routine, même si c’est plus que très difficile. Je continue la route vers Toronto où je dois prendre un avion dans quelques jours. Le cœur n’y est pas… Je roule pour faire quelque chose, mais je ne sais toujours pas si je vais monter dans l’avion…

Je m’arrête au Parc national Pukaskwa pour passer la nuit. Je m’élance sur les sentiers Manito Miikana et Southern Headland, première fois que je marche sans Ouna en quatre ans… Je marche vite, vraiment vite, comme pour échapper à mes émotions, pour les laisser loin derrière moi, mais arrivée au point de vue principal, je les laisse me rattraper. Les larmes coulent, à la fois avec peine et soulagement.

Peine d’avoir perdu ma meilleure amie, peine de marcher sans elle et de la chercher partout.

Soulagement d’enfin accepter réellement mes émotions, de les vivre et de les laisser sortir.

Jour 66 (26 septembre)

Que de la route, exténuée et vidée.

Jour 67 (27 septembre)

Après 4 h de route, j’arrive enfin à Toronto et mon premier arrêt est pour le Bureau des passeports. Je dois en effet récupérer mon passeport canadien avant de partir au Népal. Surprise… mon passeport n’est pas prêt (le dossier est envoyé depuis la mi-juin). La dame a le culot de me demander pourquoi je viens alors que personne ne m’a appelée pour me confirmer qu’il était prêt… Comment lui dire poliment que j’ai un avion le 1er octobre et que le 30 septembre étant férié, ça urge ? Elle finit par me dire qu’il sera prêt jeudi, que je peux repasser dans l’après-midi.

Je m’installe dans un Starbucks pour travailler, appelle papa et maman, puis recherche un emplacement où dormir ce soir. Trouver un spot dans une grande ville comme Toronto relève de la mission impossible. Je m’exile à une cinquantaine de kilomètres du centre-ville, dans un endroit pas super sexy, mais peu passant qui fera bien l’affaire.

Jour 68 (28 septembre)

Je troque le Starbucks pour le Tim Hortons où je m’installe pour faire mes heures de la journée. Je retourne ensuite au même emplacement que la veille. L’après-midi, je ne fais rien, perdue dans ma peine et mes pensées. Vais-je vraiment aller au Népal dans l’état où je suis ?

Jour 69 (29 septembre)

Je squatte de nouveau le Tim Hortons pour ma matinée de travail, puis me donne un coup de pied aux fesses pour me forcer à aller marcher en espérant reprendre goût, petit à petit, à une activité que j’adorais avant Ouna. Je vais voir le début des couleurs d’automne au Parc provincial Forks of the Credit, dont l’entrée est gratuite avec l’application Canoo (application à laquelle j’ai accès grâce à l’obtention de la citoyenneté il y a quelques mois).

Puis direction le Bureau des passeports où je récupère enfin mon sésame ! Ça aura été long et stressant jusqu’au bout, mais j’ai enfin mon passeport canadien ! Je m’élance ensuite dans un marathon à coup de 20 kilomètres entre différents magasins pour mes derniers achats avant le Népal. Et qui dit départ, dit lessive. Quand mon linge est sec, il est assez tard, il fait nuit, et je n’ai pas le goût à chercher un bel emplacement où passer la nuit.

Je trouve un stationnement un peu isolé par trop loin de là et m’y installe. Le stationnement de nuit y est probablement interdit, alors je me mets près de la végétation. Je n’installe pas les occultants sur les fenêtres pour que ce ne soit pas si évident que cela que quelqu’un dorme dans la voiture. Finalement, ce n’était pas une bonne idée : la route est super passante, j’ai l’impression de ne pas dormir avec tout le bruit alentour.

Jour 70 (30 septembre)

Prête de très bonnes heures, je quitte mon emplacement et il fait déjà nuit. Je vais marcher à la zone de conservation de Claireville, avant de me poser dans un Starbucks pour travailler quelques heures, mais aussi pour participer à l’événement organisé par la Fédération des communautaés francophones et acadienne du Canada pour la Journée nationale de la vérité et de la réconciliation, journée pour rendre hommage aux enfants qui n’ont jamais pu retourner chez eux et aux survivants des pensionnats autochtones ainsi qu’à leurs familles et leurs communautés. Nous visionnons le film Nous n’étions que des enfants… et j’ai de la difficulté à retenir mes larmes dans le Starbucks.

Ce soir, grand luxe, je me prends une chambre d’hôtel. Douche, épilation et préparation de mon sac pour le Népal… Le reste de la soirée est tranquille.

Demain donc, je m’envole pour le Népal, un voyage que j’attends depuis de nombreuses années. L’envie n’est pas là… anéantie par le départ d’Ouna… J’ai prévu randonner sur le trek des Trois Cols, une randonnée itinérante d’une vingtaine de jours à monter à plus de 5 000 mètres d’altitude, mais je ne suis pas certaine d’y arriver étant donné l’état psychologique dans lequel je suis…

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