Trek des Trois Cols au Népal : mon bilan

Dans cet article :

Avec Emese, vers le camp de base d’Island Peak. De gauche à droite : Lhotse I et Island Peak (Imja Tse). © Kelly Tabuteau

Je me suis envolée pour le Népal, le cœur en miette suite au départ soudain d’Ouna, et avec l’incertitude de venir à bout du trek des Trois Cols, une randonnée itinérante de haute altitude dans la région de l’Everest. Finalement, en vingt jours, je bouclais le circuit, affaiblie certes, mais fière.

Pendant vingt jours, j’ai côtoyé des sommets parmi les plus hauts du monde, tantôt seule, tantôt accompagnée d’autres trekkeurs et trekkeuses, qui comme moi, avaient fait le choix de partir sans guide ni porteur. Avec un sac à dos de 15 à 16 kilos (dépendamment de la quantité d’eau), j’ai dû ralentir le pas dans cet environnement hostile où l’oxygène manque.

Le trek, en quelques mots

Pleurs, joie, lassitude, sourires, tristesse, bonheur, frustration, béatitude, fierté, démotivation, encouragement, émerveillement.

Le trek, en quelques chiffres

🥾 20 jours de marche, 245 kilomètres et 15 800 mètres de D+
🥾 Trois cols :
Kongma La (5 540 m), Cho La (5 420 m) et Renjo La (5 360 m)
🥾 Quatre sommets :
Nangkartshang Peak (5 083 m), Chukhung Ri jusqu’au point de vue (5 415 m), Kala Patthar (5 640 m), et Gokyo Ri (5 357 m)
🥾 Trois camps de base :
Ama Dablam (4 580 m), Island Peak (5 100 m) et Everest (5 364 m)
🥾 Un budget total de 3 490 $ canadiens pour 31 jours
+ Aller-retour Toronto-Katmandou : 1 415 $
+ Sur place : 2 075 $  

Note : la région de l’Everest est plus onéreuse que celle de l’Annapurna, car elle n’est accessible qu’à pied. J’ai pris une douche quasi tous les jours, j’ai parfois acheté des cartes wifi, j’ai dormi tous les soirs en auberge où j’ai consommé tous mes repas, excepté les collations. Les menus sont semblables d’une auberge à l’autre et relativement variés : pâtes, riz, pomme de terre, légumes, poulet, œufs, le tout décliné sous presque toutes ses formes.

Le trek, en long et en large

J’ai laissé mes notes de voyage telles que je les avais prises en octobre 2022 pendant le trek. J’y retrouve finalement peu de mes interactions avec les locaux, notamment ces nombreux sourires et Namaste (prononcés Namasté-É) échangés avec les porteurs qui galopent, chargés comme des mulets, en tongs dans la boue.

Même si la barrière de la langue a limité de longues conversations avec les propriétaires de lodge, je me souviendrai toujours du comportement presque maternelle de la propriétaire de l’auberge de Gokyo.

À la relecture de mes notes, je suis marquée par la fatigue qui m’a accompagnée chaque jour, car ce n’est pas ce que j’en retiens… Aujourd’hui, je réalise à quel point cette expérience a été enrichissante et salvatrice.

Sur un plan émotionnel, elle m’a permis de commencer le deuil d’Ouna.

Sur un plan psychologique, elle m’a ouvert les yeux plus que jamais sur mes troubles du comportement alimentaire. Cette aventure m’a mise sur un chemin bien plus long et bien plus challengeant que celui que je venais de parcourir.

Mon expérience de la haute altitude

En respectant les règles d’acclimatation, notamment en faisant plusieurs randonnées à la journée accessibles depuis le trek des Trois Cols, je n’ai pas subi l’altitude.

Bien sûr, j’ai été plus lente, car je manquais d’oxygène, mais je n’ai eu aucun symptôme sérieux du mal aigu des montagnes. J’ai bien ressenti quelques maux de tête sur la montée du col Kongma, mais rien d’important puisqu’ils disparaissaient dès que je m’arrêtais. J’ai pris mon temps, car je ne voulais prendre aucun risque et je pense que mon expérience en a été optimale.

Vue sur l’Everest (8 848 m), à gauche, et Nuptse (7 861 m), à droite, depuis Kala Patthar, l’altitude la plus haute que j’ai atteinte pendant ce trek (5 640 m). © Kelly Tabuteau

J’ai rencontré plusieurs personnes qui ont dû faire demi-tour à cause d’une mauvaise acclimatation. Elles ont été chanceuses, car chaque année, il y a des morts sur les treks de l’Himalaya. En lire plus sur le mal aigu des montagnes.

À ces altitudes, tout demande plus d’énergie pour fonctionner. Tout est plus lent et il est impossible de prévoir comment le corps va réagir. En vingt jours de trek, j’ai perdu quinze kilos. J’étais en grand surpoids donc ce n’est pas la norme, mais ça prouve à quel point le corps est mis à rude épreuve.

Ça explique certainement ma fatigue générale pendant le trek.
Ça explique certainement un double cycle menstruel.
Ça explique certainement une angine/bronchite qui persiste, mon corps assurant ses fonctions vitales.

À ces altitudes, l’air est sec et froid, le soleil, impardonnable. J’étais contente d’avoir un tour de cou à placer devant ma bouche, tout comme ma crème solaire et mes lunettes de soleil.

Ce que j’ai le moins aimé

Les animaux de bât sont utilisés pour les ravitaillements dans la région de l’Everest qui n’a pas d’accès routier. C’est tout à fait compréhensible, mais j’ai eu beaucoup de difficulté à accepter la « maltraitance » visible avec hurlements et coups de bâtons sur des terrains plus qu’accidentés.

Caravane d’ânes. © Kelly Tabuteau

Les touristes avec aucune expérience de la montagne qui viennent cocher une expérience sur leur liste des choses à faire avant de mourir, sous prétexte d’avoir guides et porteurs.

Le sentiment d’intruse que j’ai ressenti en me promenant dans les rues de Katmandou, n’osant prendre aucune photo. Personne n’a été hostile avec moi, j’ai simplement eu l’impression d’être la blanche qui vient voir la misère et ça m’a dérangée.

Ce que je ferai différemment

Je ne me suis pas pleinement immergée dans la culture népalaise, la région de l’Everest se prêtant moins à cela puisque, au-dessus de Pangboche, peu de personnes vivent à l’année dans les villages. Les propriétaires d’auberge y montent pour la saison des treks. J’ai pu échanger avec eux et elles, en arrivant tôt aux auberges, avant le rush du dîner et de sa préparation. Il me semble qu’embaucher un guide est maintenant obligatoire, mais avec le recul, j’aurais peut-être dû en engager un pour me faire découvrir la culture népalaise plus en profondeur.

Je ne prendrais pas de sac de couchage dans mon sac à dos, car je ne m’en suis servi qu’une seule fois, à Gorak Shep. Toutes les auberges ont des couettes à disposition et mon drap de sac aurait été suffisant. J’aurais gagné de la place dans mon sac à dos et porté un kilo de moins.

Mes trois meilleurs souvenirs

La bifurcation sur le sentier du col Cho depuis la voie de l’Everest, où après deux jours, je renouais avec la solitude, sur un sentier qui ressemblait à un sentier et non à une autoroute.

Ce chemin, entre Lobuche et Dzongla, est un de mes meilleurs souvenirs de ce trek. Taboche, Cholatse et le lac Chola. © Kelly Tabuteau

L’arrivée au col Renja, où l’émotion m’a saisie comme jamais, car elle était mêlée à celles d’autres personnes.

Arrivée émue au col Renjo, avec vue sur l’Everest et Gokyo. © Kelly Tabuteau

La bataille avec moi-même pour franchir les nombreux ponts suspendus.

Pont suspendu entre Surke et Jorsale. Quand on ne voit pas le bout, ce n’est quand même pas rassurant… © Kelly Tabuteau

Merci, Népal, pour cette belle expérience de vie qui m’a transformée à tout jamais.

Namaste 🙏

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