Déjà six semaines…

 

Mes journées défilent au rythme de la meute, une certaine forme de sérénité grandissant au fond de moi…

 

Voilà quarante-cinq jours que j’ai posé mes pieds sur le sol canadien, avec, comme objectif, de changer complètement de vie. Je pense pouvoir dire que, pour le moment, je ne m’en sors pas si mal ! Un pari, qui peut paraître insensé pour une grande majorité de personnes, mais que beaucoup d’autres ont relevé avant moi. Aujourd’hui, j’ai décidé de vous dresser un premier bilan de ces quelques semaines au Yukon.

Dès le lendemain de mon arrivée, après un passage obligé à Whitehorse pour régler mes « soucis » de visa, mon bénévolat de handler commençait, avec le premier entraînement de la saison. Sur le papier, en échange d’être nourrie et logée, je devais assister Marcelle dans les tâches quotidiennes de son travail avec la meute. Dans les faits, mon volontariat se révèle être tout autre chose. Il s’agit d’un réel échange sur le plan professionnel et humain. Certes oui, j’aide pour brasser les chiens, pour les mises à l’attelage, pour préparer les gamelles deux fois par jour et pour ramasser les crottes, mais je n’y gagne pas que du matériel. Marcelle partage son expérience du métier de musher, en tant que guide touristique ou que finisher des deux plus grandes courses de tous les temps. Elle me transmet ses connaissances de randonneuse, me faisant découvrir les sentiers yukonnais, en m’expliquant les vertus de telle ou telle plante, ou les mœurs de tel ou tel animal… Et quoi de mieux que de sillonner l’arrière-pays en compagnie d’un guide local ? Une façon pour elle de maintenir une condition physique nécessaire à son métier, tout en essayant de me « récompenser » des efforts fournis ? Je ne peux le dire. Tout ce que je sais, c’est que j’observe et que, quelque part dans ma tête, je note tout ce qu’elle a à m’offrir.

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Partir au Yukon, c’est aussi apprendre à vivre différemment, à oublier son train-train citadin, pour se plonger dans une existence au cœur de la nature. Même si le cadre dans lequel j’évolue aujourd’hui est somptueux, même si je m’y plais, et même si je m’y épanouis, il m’aura fallu un certain temps d’adaptation. Loin de tout, j’ai dû chercher un nouvel équilibre, entre le travail et le personnel. Alors, si le ranch est tout confort (eau, électricité, télé et même internet (à faible débit et limité, mais internet quand même !)), mon quotidien actuel est à des kilomètres de celui que je menais en région parisienne entre mon boulot de coach sportif, mes entraînements personnels, mes sorties hebdomadaires au ciné et les vendredis soir entre amis. Ici, c’est la meute qui rythme mes journées. Mon temps libre est ciselé : une heure le matin, deux l’après-midi, puis après dix-neuf heures, une fois toutes les tâches du chenil achevées ; il m’appartient de faire bon usage de ces instants !

Et différemment, c’est habiter chez des inconnus, chez mes hôtes. Moi qui suis une personne solitaire, il a fallu que j’apprenne à partager mon espace (euh… même si techniquement, ce n’est pas vraiment le mien, mais le leur !) et que je trouve ma place dans cette famille, sans pour autant brusquer sa routine. C’est une vie simple, qui présente peu de différences avec celle que vous menez ; une notable toutefois, certes pas très glamour : les toilettes sèches ! Une dans la maison et une à l’extérieur. La théorie voudrait que je fasse comme Marcelle et Gilles et que je n’utilise que celle de dehors. Oui mais voilà, avoir à se revêtir d’au moins trois couches, à 3h du mat’, pour aller affronter les -15 (voire moins) de la nuit, juste pour un petit pipi, disons que le choix est vite fait… et que j’ai encore du chemin à parcourir si je veux devenir une vraie fille des bois !

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Une chance aussi que je ne sois pas :

  • trop coquette : une handleuse doit savoir mettre de côté sa manucure, ses mains douces et son brushing parfait (tout moi quoi ;)),
  • trop frileuse : je le suis mais pas de trop… je m’étais préparée à affronter des températures négatives, je ne pensais juste pas que ce serait dès mi-septembre…
  • trop maniaque. Une maison de musher, c’est une maison dans laquelle on entre et on sort, sans arrêt, avec des chaussures pas toujours très propres, parfois même mouillées ; c’est une maison dans laquelle, on cohabite avec des vêtements qui sentent le chien et où les poils s’invitent dans le salon. Mais c’est aussi un endroit où l’on y rencontre des gens supers et où l’on y mange bien.

La seule ombre au tableau : le manque de ceux que j’aime. Je ne crois pas pouvoir m’habituer à leur absence, à l’impression de louper les moments importants de leur vie, ou à la sensation de ne pas réussir à leur communiquer le bonheur que me procure ma nouvelle façon de vivre… Il va donc falloir que je supporte ce sentiment et que je le gère au mieux pour qu’il ne me ronge pas de l’intérieur. Mais qui a dit qu’une expatriation était un chemin non semé d’embûche ? Mon meilleur ami me disait dernièrement : « Je veux juste que tu sois heureuse », et c’est le cas !! Je vis, tous les sens en alerte, dans les starting-blocks pour profiter de chaque minute !

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Cela fait maintenant six semaines que j’ai mis un grand coup de pied dans mon existence rangée de banlieusarde, pour expérimenter autre chose et explorer de nouveaux horizons. Jusqu’ici, je suis servie, je rêve éveillée et j’attends impatiemment la suite.

Alors si l’idée de partir faire un bénévolat à l’étranger (ou non d’ailleurs) vous trotte dans la tête, prenez votre courage à deux mains et foncez ! Intéressez-vous, investissez-vous et vos hôtes vous le rendront. Ils auront toujours des tonnes de connaissances à vous enseigner, pour que cette expérience soit riche en émotions et en découvertes.

 

« Rêve, et rêve en grand ! Seuls survivent les rêves les plus grands. Les autres sont effacés par la pluie et balayés par le vent. », Le livre des Baltimore, Joël Dicker.

7 réflexions sur “Déjà six semaines…

  1. Kelly, encore un merveilleux texte où tu décris ta nouvelle vie là bas, malgré ta famille qui te manque (pour nous aussi, mais en fait, nous avons plus de nouvelles de ta part au bout du monde). Cela doit être magnifique de vivre la vie que tu mène. Tes reportages photos sont stupéfiants. Prends le temps de trouver le meilleurs de ce que tu recherche, vie ta vie, personne ne là vivra à ta place. Tu communiques tous les jours avec tes parents (ton père me là dit). Continue dans ta lancée. Bisous de Cathy et de moi-même. Cathy m’a aidé à trouver les mots. Nous t’aimons. Vive la vie.
    Cathy & Willy

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    1. Coucou Cathy & Willy,
      En effet, on se donne plus de nouvelles que quand nous étions qu’à une centaine de kilomètres les uns des autres… Merci en tout cas de votre soutien et de votre fidélité toutes les semaines 🙂
      Gros bisous à vous deux !

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  2. Cette impression de manquer des moments importants… Mon dieu que je connais ça !! Je rentre dans moins de deux semaines maintenant, mais ces 9 mois au Québec m’ont appris que tu ne peux pas être partout à la fois, et qu’il te faut aussi vivre ta vie. Evidemment qu’on loupe des choses, mais on en vit de si belles à côté !! Et l’expérience de musher est vraiment une des plus belles que tu pourras vivre ! Je l’ai fait une dizaine de jours en Norvège il y a deux ans, c’était court mais j’ai tellement aimé ça !! Puis les paysages, les aurores boréales… Si je suis prise en PVT, je reviens et je passe par le Yukon pour sûr !!

    Bel article en tout cas 😉

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    1. Salut Érica !
      Et oui, je me doute bien que c’est un sentiment partagé par beaucoup de voyageurs… L’envie de partir est trop présente alors on fonce, et comme tu dis, on vit des choses superbes ! Merci en tout cas pour tes ondes positives 😉
      Et bon retour en France !

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  3. Bonjour Lily?
    Bravo, pour ce que tu as accomplis, c’est un bel acte de tout laisser tomber pour partir vers l’inconnu. Combien comptes-tu rester de temps encore là bas?
    En tout cas, très joli texte qui donne envie de partir…
    Gaïa, une inconnue hésitante sur son avenir.

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